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lundi 3 avril 2017

Dimension fées, de Collectif





Résumé

Anthologie de nouvelles présentées par Chantal Robillard.

Textes de Olympia Alberti, Jean-Pascal Ansermoz, Christiane Baroche, Ugo Bellagamba, Pierre Bordage, Elizabeth Chamontin, Muriel Chemouny, Henri Etienne Dayssol, Philippe Di Folco, Pierre Dubois, Sylvie Durbet-Giono, Estelle Faye, Patrick Fischmann, Claudine Glot, Joel Henry, Emmanuel Honneger, Olivier Larizza, Jacques Lovichi, Hélène Marchetto, Sybille Marchetto, Roland Marx, Chantal Robillard, Joel Schmidt, Hervé Thiry-Duval, Françoise Urban-Menninger et Bernard Visse.
Nouvellistes, conteurs, poètes, journalistes ou chercheurs, et même un elficologue et un féericologue, tous de styles variés, vous feront ici découvrir leur vision des fées, intemporelles ou actuelles. Oui les fées existent, en tout cas ici !

Car cette anthologie vous propose une lecture-promenade buissonnière à travers les époques, les frissons ou les rêves... Vous y rencontrerez des fées du logis ou des champs, des Carabosse insolites, des dames de fontaines ou de stations d'épuration, du désert ou des forêts, des Restos du coeur ou des étoiles... Des fées virevoltantes, bienveillantes ou vengeresses, mais aussi des "fées mûres", des pandas, du lierre grimpant... Pas de raton laveur dans cette anthologie, mais un enchanteur : le grand Giono, vu par sa fille.

A déguster sans modération, l'abus de lecture ne faisant de mal à personne !




Mon avis

Dès la préface, on comprend que « Dimension Fées » est une anthologie qui valorise la diversité : diversité des auteurs et des points de vue. On y rencontre des écrivains, novellistes, conteurs et poètes, dont l'influence se veut plutôt traditionnelle ou plus moderne, voire mixte. Même si tous connaissent les fées et leur univers (de près comme de loin, qui n'a pas un minimum de connaissances sur le sujet ? Les clichés abondent, les informations plus culturelles aussi, mais l'anthologie recèle des spécialistes, des passionnés), les approches de chacun diffèrent et offrent au lecteur des textes qui se rejoignent où s'opposent sur certains points.
Certains se focalisent dans le récit sur les fées, d'autres sur les personnages, jouant sur la narration, variant soit à la première ou à troisième personne. En effet, les plumes s’adaptent au besoin de l'écrit: toujours fluides et agréables à la lecture, au langage soutenu ou plus familier, mais ne tombant pas dans l'excès.

Les fées prennent donc des formes variées et deviennent un peu plus accessibles aux hommes (sauf exception). Leur côté sacralisé disparaît, même si leur dimension reste toujours supérieure à celle des humains. Leur pouvoir, quel que soit sa forme, ne disparaît pas et elles choisissent leur manière de se manifester : des simples ombres à l'amante secrète. De même en va avec les hommes concernant leur intérêt pour leur existence. Sauf exception, elles attirent le regard, la sympathie.

Dans le monde moderne, elles semblent plus proches : que ce soit une fée, œuvre du diable qui vient en aide aux pauvres, à la sœur bien aimée (le fantôme, la sœur fée) qui œuvre pour la liberté du personnage. Les fées peuvent également se montrer sans pitié quand on ne croit pas en elles,ou hors de portée quand on cherche à déceler leurs secrets. Le choix d'une vie humaine, près de l'être aimé peut également les priver du statut féerique.
La vision plus traditionnelle décrit les fées, plus fidèles à notre culture et à certains clichés, que l'on reconnaît alors plus facilement : belles et gracieuses, mystérieuses.

La frontière entre le monde réel et le monde féerique s'avère plutôt trouble dans les récits, tout en restant inaccessible. Le peuple des fées n'ouvre pas les portes de son monde au premier venu. Que ce soit en refuge ou en rêve, la frontière pourtant mince se clôt aux non-initiés. Il faut croire, savoir le reconnaître et il faut être raffiné, différent, proche des leurs et de leurs coutumes sans doute, pour découvrir leur existence, ou leurs domaines et secrets bien gardés.
Parfois, il est inutile d'entrer dans le royaume des fées ou de connaître son peuple mystérieux :on peut faire de sa vie un conte de fée, ou tout simplement être la fée de quelqu'un.

L'ambiance et les descriptions sont bien mises en place dans chacun des récits. Du franc parlé, en passant par le récit traditionnel, conté de manière teintée d'humour ou plus sérieux, aux jeux de mots, à la poésie, l'anthologie fait le tour de divers styles, nous fait voyager dans des lieux et dans le temps de manière fort agréable.

La conclusion, récit à part entière, permet à la fée à l'origine de l'anthologie de nous faire découvrir les auteurs et éditeurs, sous l'esprit vif de sa plume. Une fin glougloutante bien amusante...
De toutes les nouvelles, poésies et contes lus, j'avoue une affection particulière pour la fée Mélangette, bien ancrée dans notre quotidien et faisant preuve d'un soutien concret, réel. Certes, on perd le côté féerique, mais j'apprécie son état d'esprit. Sinon, j'ai aimé les textes de manière inégale, trouvant mon bonheur aussi bien dans les plutôt modernes ou plus traditionnels. Monsieur Paul, qui trouve refuge dans les Roches Longues (sanctuaire de nature) parmi les ombres, m'a également touché.

En conclusion, j'ai découvert en « Dimension fées » la diversité promise, des textes de qualité. Chacun peut y trouver sa perle rare : il y en a pour tous les goûts. Je remercie le forum « Au cœur de l'Imaginarium » et les éditions Rivière Blanche pour cette découverte intéressante.

mercredi 1 mars 2017

La Pierre d'Isis, de Dorian Lake T1 Isulka la Mageresse




Résumé
Isulka est une mageresse marginale, un peu vénale, mais surtout très endettée, vivotant en donnant des spectacles de magie dans des cabarets parisiens. Scipione est un spadassin vénitien comme on n’en fait plus, un reliquat du passé exilé de la Sérénissime, trahi par ses pairs et en quête de Vendetta.
Recrutés par un employeur anglais pour subtiliser une bague qu’on lui aurait dérobée, la mission se révèle sous un tout autre jour lorsqu’ils découvrent la valeur réelle et symbolique du joyau. Plus question pour Isulka et Scipione de travailler à prix bradés.
L’appât du gain les mènera de Paris au Caire, de coups bas en coupe-gorges, une course-poursuite s’engageant entre les protagonistes, des espions, des criminels et une inquiétante secte égyptienne…



Mon avis

Dorian Lake nous propose avec son roman Isulka la mageresse (premier tome de La Pierre d'Isis) un roman d'aventure teinté de fantastique, drôle et vif.

Dés le début du récit, nous voilà plongés dans le feu de l'action et on ne connaît que peu de temps morts. Même s'il prend le temps de décrire les personnages et lieux, l'ambiance générale - juste ce qu'il faut pour laisser le lecteur s'immerger - Dorian Lake laisse place avant tout à l'action, aux scènes tantôt cocasses, tantôt drôles ou percutantes. Le style fluide et efficace, des dialogues toujours naturels et piquants offrent au lecteur une lecture très agréable et même prenante, même si l'intrigue reste prévisible.

Les personnages, loin d'être des héros s'avèrent bien caractérisés et charmants de par leurs défauts qui sont nombreux... La lecture n'en n'est que plus savoureuse.

Le récit mené à la troisième personne se centre essentiellement sur deux personnages : Isulka la mageresse et Scipione l'Italien.
Isulka, loin d'être une grande dame, possède le vice du jeu, ce qui la met dans un sacré pétrin. Endettée, en proie d'un usurier pas très recommandable, elle cherche le moyen de payer ses dettes. Isulka n'est pas présentée comme une beauté, mais comme une femme charmante, marquante, ne manquant pas d'atouts et à la langue bien pendue (à la fois sa qualité et son plus grand défaut). Intelligente, pétillante, elle séduit vite le lecteur.
Scipionne l'Italien ne manque pas de se présenter sous le jour du stéréotype du charmeur Italien, surpris dans le lit d'une dame par son mari officier. Avide de vengeance, l'appât du gain l'emmène dans l'aventure avec Isulka.

Le déclencheur se présente sous les traits d'un anglais, de premier abord tout à fait banal, mais espion de la cour d’Angleterre, qui leur confie une mission plus périlleuse qu'elle ne le paraît.

Le duo Isulka-Scipione se révèle explosif, celui ci ayant le tord de sous-estimer la jeune femme, en tout bon macho Italien qu'il est. Mais celle-ci n'a pas dit son dernier mot. Heureusement, Scipione possède également plus de charme et plus de cœur qu'il ne veut bien le dévoiler. Excellent escrimeur, il se sauve ainsi de bien des mauvais pas.
Entre situations périlleuses, amusantes, trahison et amitié, les deux jeunes gens seront obligés de coopérer de façon plus ou moins directe.

L'espion Anglais reste plus difficile à cerner : entre naïveté (il donne bien trop de renseignements au duo) et duplicité (il n'hésite pas à les envoyer face au danger), on doute de sa sincérité, Isulka aussi d'ailleurs.
Aslan l'homme à tout faire du Britannique, froid mais dangereux, ne manque pas non plus de ressources et se montre fin calculateur.
Les personnages s'avèrent donc bien intéressants et les masques tombent au fil de l'intrigue.

La magie, bien présente à travers le don d'Isulka, puis de rituels plus ou moins macabres, reste plutôt bien dosée, suffisamment discrète pour ne pas étouffer l'intrigue et l'action. Parfois, elle l'est un peu trop, car la mageresse n'en n'use que très peu finalement, même si elle a bien entendu ses raisons de se montrer prudente.

En conclusion, Isulka la mageresse fut une bonne lecture, palpitante, prenante, clairement divertissante. Pas le temps de s'ennuyer !
Je serais curieuse de lire la plume de l'auteur sur d'autres écrits et lirai avec plaisir la suite des aventures d'Isulka.
Je remercie le forum Au cœur de l'Imaginarium et Les éditions Lune écarlate pour cette très bonne lecture.

mercredi 8 février 2017

Dimension Sidération, de Collectif


Résumé

Né de l'imagination de Serge Lehman, dont l'un de ces recueils porte le titre, La Sidération attire de nouveaux auteurs, comme le prouve cette anthologie dirigée par Noé Gaillard.

Vous avez, un jour, été complètement stupéfié par quelque chose auquel vous n'aviez absolument pas pensé, que rien, jusque-là, ne vous avait préparé à admettre, à envisager... A moins que, comme le personnage de la première nouvelle ici proposée, vos préoccupations ne vous aient tout simplement fait accepter cet "impensé" pour du normal... du convenu implicite... Ainsi, on peut trouver sidérant aussi bien ce que l'on n'avait pas imaginé, que l'incapacité à imaginer. Alors, surgissant des ténèbres, de l'au-delà de la nuit, l'auteur vous offre de quoi être stupéfait et vous aide à imaginer son monde pour qu'au gré de la lecture, plus rien de ce qui est raconté ne vous surprenne... pour de douces sidérations.


Mon avis


Dès la préface, le ton humoristique introduit l'ironie que l'on retrouve dans l'anthologie : ironie caricaturale ou plus dramatique, selon l'histoire lue.
Elle apporte également des éléments d'informations sur le thème de la sidération : ce qui est stupéfiant, que l'on trouve difficile ou incapable à imaginer. Elle invite alors le lecteur à entrer dans le récit et à se laisser porter par le texte. On comprend bien mieux l'implication de ces conseils à la lecture de l'anthologie.
Comme pour chaque édition des anthologies « Dimension... » chez Rivière Blanche, les nouvelles sont présentées avant la lecture, pour préparer le lecteur. La présentation de l'auteur reste située à la fin et n'alourdit pas l 'ensemble.

La narration des nouvelles proposées se fait largement à la première personne. Dans l'une d'elle, le mélange de la première et troisième personne prend son sens. Quelle que soit la narration adoptée, elle est choisie avec logique et stratégie. Le but reste d'emmener le lecteur, de lui faire perdre ses repères en même temps que le personnage, voire jusqu'à la folie. Le doute est toujours permis à la première personne, celle de la vision rapportée du personnage. Il piège le lecteur, l'emmène dans la fiction, l'installe dans la sidération.
Les personnages possèdent un rythme différent. L'immersion peut être directe ou il peut mettre du temps à se dévoiler, de manière naturelle, par jeu, pour faire durer le suspense.
La plume des différents auteurs, toujours fluide, se révèle parfois plus riche, et même poétique.

Faire entrer le lecteur dans la sidération, c'est aussi le mener au sein de la fiction, lui faire accepter l'anormalité, l'irrationnel comme la réalité. 
Les nouvelles de SF ou fantasy s'appuient sur des descriptions détaillées et un vocabulaire bien précis, pour rendre le récit visualisable, vivant et réaliste.
Les mises en situations bien amenées entraînent dans des intrigues mystérieuses, caricaturales, parodiques. Parfois, le lecteur tombe dans un délire bien construit, ou alors n'ayant ni queue ni tête et restant agréable à la lecture. Ce gentil fouillis, parfois noyé sous une profusion de personnages, plaît, même si le sens peut vite échapper au profit de l'incompréhension. C'est totalement subjectif, selon le lecteur : la magie ou plutôt la sidération prend ou non.
Dans cette logique, on retrouve également deux histoires, où des segments de récits sont imbriqués de manière aléatoire, tout en restant logiques : un puzzle intéressant à reconstituer (il faut juste s'accrocher pour suivre le fil)

L'ironie se retrouve donc dans la narration, mais également dans le retournement de situations ou des rôles des personnages (stéréotypes inversés), tout à fait plaisants à la lecture. 
Ce retournement se retrouve également au niveau de l'intrigue, dans les chutes proposées qui bien souvent servent à surprendre et sidérer le lecteur (et souvent le personnage). Il confère la dimension surréaliste (sidération) de l'intrigue et des nouvelles. Parfois, la chute ne vient pas malgré l'attente et il semble manquer quelque chose, même si le récit reste sympathique à la lecture. 
Mais quand elle tombe, qu'elle soit la grâce de Dieu (ironie inside, Dieu possède un bon sens de l'humour (noir) visiblement), ou pour la plupart une bonne dose de mystère, elle s'avère le plus souvent parfaitement réussie.

La sidération s'insinue également dans les nouvelles, de façon plus précise.
Des entités (ennemies ou alliées) défient l'imagination par leur forme, leur nature, leur originalité. Qu'elles soient créatures extra-terrestres, ou à l'échelle d'une planète, d'un système, ou simples anomalies dans la « réalité », elles diffèrent de tout ce que l'on peut connaître, sidèrent ou causent l'état de sidération (de pétrification). Les symptômes des personnes sidérées divergent selon les situations, mais se rejoignent sur le plan clinique (la définition médicale de sidération).
On aime visualiser comme dans un film les créatures hors normes, éloignées de tout ce qui semble conventionnel, défiant même les limites de la fiction. La réalité s'efface et c'est bien un voyage en Dimension Sidération qui transporte le lecteur. L'efficacité de l'évasion annonce un retour difficile à la réalité pour les personnages, comme pour le lecteur.

En conclusion, les nouvelles de l'anthologie Dimension Sidération m'ont touchée de manière inégale : très fortement pour certaines, moins pour d'autres, voire pas du tout, pour celles à côté desquelles je suis passée (ce n'est que subjectif, ce peut être mon inculture sur certains sujets qui est en cause ici). 
Ce n'est pas une anthologie entièrement accessible et encore de façon très subjective, mais tellement fascinante qu'il ne faut pas passer à côté.
De très bonnes lectures au final ! Je remercie Rivière Blanche et Au cœur de l'Imaginarium pour cette très intéressante découverte.


jeudi 22 décembre 2016

Lune de miel, de Manon Elisabeth d'Ombremont



Résumé

Paris, 1876. Lison a perdu ses parents, assassinés dans des circonstances mystérieuses et particulièrement sanglantes.
Un an après, elle tente toujours d'échapper à la folie. Au cœur des ombres, un monstre émerge et la tourmente, quelques jours avant son mariage arrangé. Réalité ou construction d'un esprit malade ? Parfois, la frontière peut être mince.
L’écriture de Manon Elisabeth d’Ombremont est d’une incisivité diabolique et vous entraîne au seuil d’une démence certaine.

Mon avis

Lune de miel est une nouvelle fantastique de Manon Elisabeth d'Ombremont, jeune auteure, dont on peut également suivre la série de dark et urban fantasy « Nechtaànomicon » publiée par les éditions L'Ivre-book.

Le nouvelle « Lune de miel » entraîne le lecteur dans une parenthèse certes courte, mais intense, à mi-chemin entre rêve (ou plutôt cauchemar) et réalité. L'ambiance teintée de morbide, de macabre et d'un côté malsain accompagne le personnage principal, jeune fille au destin tragique, mais aussi le lecteur, qui se laisse happer par son atmosphère tragico-mélancolique. On ne peut que s'attacher à Lison, jeune fille suicidaire, à la santé mentale fragile et trembler pour elle.

L'auteure M.E. d'Ombremont prend le temps de mettre en place le personnage principal de Lison, mais aussi les personnages secondaires, tels sa tante égoïste et malveillante, son futur mari, et sa très chère sœur, seule raison qui la fait hésiter à franchir le pas (passer la corde autour de son cou).
Rien de gai dans cette nouvelle imprégnée d'une forte mélancolie, à la fois désespérée et dangereuse. On y trouve en effet désillusion, tristesse et désespoir. Nous suivons Lison sur le sentier du non-retour entre cauchemar et démence grandissante : la frontière restant mince entre les deux. Le lecteur peine à trouver le vrai du faux dans ce cheminement macabre. 

On se retrouve même parfois mal à l'aise, touché par un soupçon d’obscénité (celui-ci toujours accompagné d'une sensualité trouble et équivoque, voire sadique), qui existe dans la relation, liant Lison à un mystérieux inconnu. Leurs étranges connexions nous dévoilent un individu auquel la jeune fille ne peut résister. Celui ci est animé d'une tendresse violente, d'une douce luxure, qui poussent Lison un peu plus loin dans sa chute. Mais peut être est-ce le dessein de cet homme aux intentions semblant pernicieuses ?
De plus, Lison se livre à des automutilations et tortures mentales : la jeune fille trouve de l'esthétisme et une forme de beauté dans ses propres cicatrices, mais continue de ruminer sans cesse la mort de ses parents, véritable déclencheur et guide de son évolution cauchemardesque.

L'auteure met en place le récit de manière judicieuse, dans le déroulement des scènes et les informations distillées le long du récit : cohérence de la narration pour mieux perdre Lison dans sa folie et le lecteur dans ses doutes. Le style élégant et fluide, les descriptions détaillées des émotions et sensations y contribuent aussi largement.

La conclusion est à l'image de la nouvelle, tout aussi macabre et ironique, cela va sans dire, et contribue à la cohérence du récit. Il privilégie esthétisme de l'écriture, de la narration, à l'intrigue en elle même. C'est une nouvelle qui se savoure à la lecture, sans suspense, mais avec une délectation doucereusement malsaine. 
L'auteure manie le format court avec justesse et élégance, atteint son but et entraîne le lecteur, même si le sort du personnage principal reste prévisible. C'est le cheminement qui compte, non le point final.

En conclusion, ce fut une découverte fort intéressante. La plume riche de Manon Elisabeth d'Ombremont, son style et la mise en place du récit, me laissent impatiente de découvrir « Nechtaànomicon ». Je remercie les éditions l'Ivre-book et le forum « Au cœur de l'imaginarium » pour cette belle et enrichissante découverte.

mardi 20 décembre 2016

L'Emprise du Lwa de Patrice Mora


Résumé

Au cœur de Paris, à quelques mois de l'exposition universelle, Mortimer et Lawrence se voient confier une nouvelle mission.
Les deux gentilshommes doivent se rendre à l’ambassade d’Autriche Hongrie.
Membres de la Loge, organisation occulte chargée de réguler les interactions de la capitale des enfers sur le genre humain, ils entendent mettre un terme à une odieuse alliance.

Alors qu'ils délivrent l’avertissement de la Loge, ils remarquent la présence d’un étrange dandy.
Noyé dans la mousseline des robes de soirées, il évolue aussi bien parmi les diplomates que les démons infiltrés.
Le curieux personnage laisse dans son sillage une aura pimentée aussi puissante qu’une malédiction exotique.
Sa seule présence se pose aussitôt comme une nouvelle énigme.

À la recherche d’une explication, Lawrence va entrainer son novice Mortimer dans l’univers du vaudou, où les relents de la mort se mêlent aux arômes de rhum et de tabac…


Mon avis


Le récit débute sur une mise en place un peu longue. Mortimer, personnage principal, narre son histoire à la première personne. Le style est fluide, mais il faut un temps pour s'adapter à l'emploi du présent pour un récit au passé et plus précisément au XIXème siècle. Je ne sais si c'est ce décalage (au niveau temporel) ou une narration un peu froide et peu expansive du personnage (qui ne livre pas ses pensées), qui m'a posé problème pour rentrer dans l'histoire. Les descriptions m'ont semblé également un peu trop développées et artificielles. 
Heureusement, le récit gagne ensuite en fluidité, même si la narration reste toujours un peu distante. Le personnage garde ses mystères. Il faut attendre les péripéties du récit pour que la narration se débloque, permettant de mieux visualiser et vivre les scènes. 

On découvre donc le personnage principal, mais aussi son nouveau partenaire de « travail ». Ce duo formé depuis peu apprend à se connaître au fil du récit et développe une complicité intéressante. Ils cachent des secrets, qu'ils dévoilent l'un à l'autre, et par la même occasion au lecteur, au fil des pages. Et les mystères ne manquent pas !
Le personnage principal, en particulier, possède une identité double et trouble. Il cache « un autre », qu'il doit contenir et maîtriser. Sûr de lui en toute occasion, il ne manque pourtant pas de failles, car son double gênant constitue une menace puissante, d'où son soucis de le dissimuler aux yeux des autres et de son nouveau compagnon. C'est une lutte au quotidien, accentuée par la douleur que lui inflige l'ennemi. Même à la fin du roman, quand le lecteur comprend les tenants et aboutissants de son étrange personnalité, il se garde d'avouer la vérité. 
Ce personnage pourrait paraître un peu austère. Même s'il doit garder son sérieux et rester concentré pour enchaîner son double, il sait se montrer badin, voire provocateur.

Le roman nous offre un récit fantastique mêlant magie, démons, rituels, sortilèges, artefacts et amulettes. On y trouve une touche singulière, bien agréable, conférant de l'originalité à l'histoire. En effet, l'ennemi auquel se confronte notre héros s'avère intrigant, difficile à cerner et à appréhender. Il apporte son lot d’exotisme entre pratiques vaudou et croyances africaines. L'auteur arrive même à nous présenter des zombies d'un genre bien particulier. L'histoire ne manque donc pas d'idées surprenantes. De plus, mettre en place ce côté exotique dans un Paris du XIXème siècle offre d'autant plus de piment à l'histoire, pour le plus grand plaisir du lecteur. 

Les termes sont précis, les pratiques bien décrites, intrigantes et rendent le récit plus prenant. Les descriptions qui m'ont semblé un peu lourdes au début, deviennent ensuite plus naturelles et appréciables à la lecture. L'auteur sait camper l'atmosphère, décrire le Paris du XIX ème et lui faire prendre vie. Il réussit particulièrement également à livrer les scènes de transes et de voyages oniriques. 

En conclusion : malgré un début difficile, je me suis laissée emmener par le récit. L'histoire, la magie et son originalité m'ont séduite : une bonne lecture au final. Je remercie le forum Au cœur de l'Imaginarium et les éditions du Petit Caveau pour cette belle découverte.

mercredi 14 septembre 2016

Requiem pour âmes d'ombres de Jean Michel Archaimbault




Résumé

"La Fée Noire... Un vrai cancer mental !
Des ondes négatives et destructrices émanaient de ce monstre. Des vagues de terreur pure, glaciale, paralysante.
L'homme en était arrivé à un point que je ne connaîtrais jamais. Il ne savait plus sortir de l'impasse dans laquelle, en jouant, je l'avais conduit à s'enfermer. Il avait essayé de fuir en composant des images transfigurées, abstraites, pour tenter d'y voir plus clair en lui-même. Mais il n'en avait que replongé, et plus profond encore."

Soudain, l'été 1989. L'été d'incertitude…
Il peut suffire d'un rien à des hantises oubliées et à des fantasmes enfouis pour remonter à la surface. Alors, un désir inaccessible exige son aveu. Des rêves sûrement cryptés imposent leur récit. Des lieux connus depuis l'enfance demandent à se dévoiler dans le prisme d'un imaginaire parfois traumatique. L'envie de fuir n'importe où, hors du monde, cherche à s'exprimer dans toutes les nuances de l'angoisse ou de l'étrange. Puis tout un équilibre menace de se rompre.
Mais quel sera le terme de ce voyage au bout de la nuit ? Les ténèbres des abîmes, ou un chant de REQUIEM POUR ÂMES D'OMBRE... ?

Après Seentha, son space opera wagnérien, flamboyant et désespéré, voici Jean-Michel Archaimbault "plus noir que vous ne pensez" dans un tout autre registre.
Quinze textes de fantastique intimiste, sans monstres ni horreurs tangibles, où démons et merveilles surgissent de l'inconscient profond. Quinze perspectives ouvertes sur la fascination ou le vertige...




Mon avis

En ouvrant le recueil, j’ai eu la bonne surprise de trouver une préface écrite par Anne Guduël (la regrettée Gudule), dont j’ai découvert la plume avec « Dancing Lolita », extrait du « club des petites filles mortes ».
Elle nous parle de l’auteur « Jean Michel Archaimbault », de sa plume poétique, de son univers teinté d’irréalité: la frontière avec le réel reste toujours floue, celui-ci contaminé par les mondes imaginaires de l’auteur. Elle évoque sa plume poétique et sa subtilité, présentant les 15 nouvelles comme des « des échappées ». L’envie de commencer le recueil, comme un voyage onirique, s’installe à la lecture de cette préface savoureuse  et on a hâte de s’y plonger !

On sent les deux auteurs proches, liés par une « sensibilité jumelle ». Il me faudra dès que possible me lancer dans la lecture du « Club des petites filles mortes » également. (c’était déjà mon intention, mais me voilà d’autant plus motivée.)
Cette complicité littéraire se dévoile un peu plus dans le premier écrit : Petit fragment resté dans la pénombre, prélude initial actualisé et inédit au « Club des petites filles mortes ». L’auteur évoque le livre, Dancing Lolita entre autre et s’adresse à Gudule, pour faire écho à ses paroles, à leur complicité partagée. Un bel échange, une belle amitié.

Les nouvelles sont toutes présentées par l’auteur, qui y cite ses inspirations, ses influences (rêves, auteurs comme Lovecraft ou Dunsany et textes écrits pour un thème précis, pour une anthologie). Il nous accompagne le long des récits, nous invite et nous met à l’aise. On sent son investissement. Celui ci qui paraît d’autant plus personnel, car l’enfance, les souvenirs qui y sont liés, ainsi qu’une dose de nostalgie apparaissent dans certains écrits : à la lecture, on sent le vécu. La narration à la première personne accentue ce sentiment que souvenirs réels et imaginaires se côtoient, entre rêve et réalité.

Dans le recueil, on retrouve une narration bien maîtrisée, quel que soit le point de vue adopté, que ce soit à la première ou troisième personne. Jean Michel Archaimbault joue même avec ces points de vue, pour renforcer l’ironie par exemple dans La faute aux fusées.
Il sait également faire monter la tension dans ses récits, entraîner le lecteur. Les style y contribue aussi: riche, soigné et poétique, avec de belles descriptions, nombreuses, précises, parfois courtes, mais toujours efficaces. On vit le récit, on s’y projette, y plonge avec plaisir, surtout une fois que la réalité bien ancrée se trouble pour laisser entrer le fantastique.
A travers le thème de l’enfance, l’auteur fait parler son imaginaire, car c’est l’âge où tout est possible. Il se rappelle « le petit citadin à l’aise à la campagne ». Il fait parler ses fantasmes et peurs dans des lieux qui lui sont familiers depuis longtemps (très prégnants dans le recueil), ou d’autres qu’il a visité (Branwyn par exemple se déroule en Irlande): des lieux qui l’ont influencé et inspiré. Il se révèle à demi-mot, mais entrouvre des portes, où s’infiltre toujours réel et imaginaire.
Il utilise également avec brio les hasards, pour amplifier l’ironie du sort, mieux piéger ses victimes et le lecteur. Dans Jeux d’une âme d’ombre et Requiem pour âmes d’ombres (première et dernière nouvelle du recueil, deux parties d‘une même histoire), une âme damnée se fait prendre à son propre piège.

La frontière entre réel et imaginaire s’avère donc fragile, les récits oscillant entre merveilleux et angoisse (voire menace), selon la porte qui s’ouvre au lecteur. Parfois, l’entrée se fait dans notre monde, l’étrange s’invitant dans notre réalité, parfois, un passage s’ouvre entre deux mondes ou deux dimensions. L’auteur parvient même à les faire se chevaucher dans un angle, comme une fissure entre réel et invisible : le surnaturel peut investir notre monde, comme on peut y entrer ou se retrouver prisonnier. Entre échos d’autres époques, menaces provenant de personnages hostiles (comme la bête, le vampire psychique), on retrouve aussi les amis imaginaires, et d’autres personnages issus du folklore ou de l’imaginaire enfantin.

Beaucoup des nouvelles évoquent finalement la fuite d’une réalité peut être trop présente, et/ou de l’âge adulte. Que ce soit une fatalité ou un choix, l’invitation des mondes fantastiques semble trop tentante pour les personnages principaux et pour le lecteur qui profite de l’évasion.

La mise en place de l’atmosphère favorise cette échappée, en teintant d'imaginaire la réalité avec subtilité et légèreté. La dimension fantastique, le flou onirique introduits par l’auteur restent en effet crédibles, donnent envie d’y croire le temps d’une lecture, voire plus pour les rêveurs...
Seul petit bémol, la transition entre réel et quotidien semble parfois abrupte.

Le recueil se termine sur un article : Une Académie Pour Perry Rhodan, série de science-fiction qui tient particulièrement à cœur à Jean Michel Archaimbault et qui a su éveiller mon  intérêt.

En conclusion, j’ai retrouvé le style de Jean Michel Archaimbault avec grand plaisir. Quelle belle plume ! Le recueil m’a permis de le découvrir sous un autre format, la nouvelle, que j’ai bien apprécié. Si je devais citer ma nouvelle préférée, je citerai sans doute La fraternité de Molua et ses étranges créatures des lagune ou Dix de la masse critique, où les livres deviennent des personnages à part entière du récit, mais beaucoup d’autres me viennent à l’esprit. Entre rêve et  réalité, ce livre correspond bien au blog, car évidemment, j’ai aimé cette frontière invisible et fragile que l’auteur sait imposer, cet imaginaire qu’il laisse se déployer. Un recueil à découvrir !



Retrouvez d'autres chroniques des romans de Jean Michel Archaimbault sur ce blog :



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lundi 22 août 2016

Skitswish, ép.1 - Le prix du bélier, de Céline Thomas




Résumé

La vie romancée de la chanteuse de Jazz, Mildred Bailey. Une histoire d’amour sombre et tragique sur fond de prohibition et de magie indienne.
Pougheepsie, 1947.
Alors qu’elle approche de la fin de sa vie, Mildred, rongée par la maladie, revient en pensée sur son passé tortueux. Elle a été la plus grande chanteuse blanche de musique noire et a brûlé les planches des plus grands clubs de jazz... Pourtant, elle est rongée par ses actes manqués. Elle ne cesse d’être torturée par le souvenir de Ted, son unique amour, sa dévorante passion, à qui elle a renoncé pour l’attrait des feux de la rampe. Que ne serait-elle prête à faire pour changer le cours des choses, pour remonter le temps et changer sa destinée...



Mon avis


C’est la très belle couverture de l’épisode qui a attiré mon regard sur « Skitswish », puis le titre original, un peu mystérieux. Le résumé a fini de me convaincre d’essayer littérairement une époque (celle de la prohibition) que je connais peu.
L’auteure Céline Thomas avertit en édito qu’elle s’inspire de la chanteuse de jazz Milfred Bailey (que j’ai écouté sur le net par curiosité, ça met dans l’ambiance), mais prend des libertés, chronologiquement et sur le plan ésotérique, bien entendu !

On retrouve en introduction le personnage, femme de quarante ans rongée par la maladie (diabétique) et qui repense avec mélancolie et nostalgie à sa vie. Entre regrets et actes manqués, elle songe à Ted, son ancien amant.

L’auteur propose ensuite le récit par couplet, premier, second couplet…

Dans le premier, les flash-back renvoient la chanteuse dans un club vide, où elle chante malgré tout avec un plaisir évident. Le style est fluide, emporte, mais manque de poésie. La plume de l’auteure est plutôt efficace et cash, bien adapté à son personnage, son côté direct et naturel. La narration à la première personne renforce le sentiment d’être proche de cette femme qui met ses tripes dans ce qu’elle fait et notamment dans la musique où elle exprime ses sentiments. Elle nous permet une familiarité agréable, qui charme et donne de la densité au récit.

La rencontre avec Ted m’a un peu plus déçue.
Les dialogues manquent de naturel. Ce qui tranche avec la narration pourtant bien maîtrisée. La romance s’amorce un peu trop vite, même si on découvre la facette un peu plus effrontée du personnage. C’est sur ce point que j’ai tiqué et trouvé le dénouement amoureux rapide, car si la veille elle prend la fuite devant l’homme qui l’aborde, le lendemain c’est elle qui lui vole le premier baiser. Il devient vite entreprenant et avide, mais là encore c’est lui qui prend les distance nécessaires. 
En deux jours, tout se complique dans la vie de la chanteuse… vraiment trop rapide à mon goût, même si l’ensemble reste plaisant à lire. 

Dans le deuxième couplet, on apprend le destin tragique de Ted, dévoilé par un détective que la chanteuse a engagé. Les regrets n’en sont que plus vifs, et la suite nous explique en quoi le personnage en ressent une sorte de culpabilité. 

Le troisième couplet devient très intéressant avec l’arrivée du surnaturel et d’un rituel bien particulier : le rituel Skitswish. Celui-ci permet, par symboles totems de changer la destinée de celui qui l’invoque… changer le cours de choses. Ce n’est pas la première fois que la chanteuse le pratique - auparavant afin d’accéder à la réussite -, mais ce n’est ni sans conséquences, ni sans sacrifices. 

En conclusion, ce récit instaure une bonne mise ne place de l’histoire, dans ce premier épisode, et laisse le lecteur curieux et en attente. Comment les choses vont-elles évoluer pour la chanteuse ? A-telle une chance de se racheter, d’éliminer les regrets qui la rongent, d’éviter la maladie et peut être retrouver Ted ?
Beaucoup de questions qui trouveront sans doute réponse dans les épisodes suivants. Une série intéressante à suivre, même si le côté romance m’a moins passionné que le côté ésotérique de l’histoire.
Je remercie le forum Au cœur de l’Imaginarium et les éditions L’ivre-book, pour cette agréable découverte.

mardi 19 juillet 2016

Codex Memoriae - Les Âmes du purgatoire, de Christophe Michaud




Résumé

« Papillon dans la nuit, tel un enfant, j'erre dans le vide qui m’entoure, attiré par des lumières qui se révèlent à moi. »

Un vagabond amnésique est conduit au sanitarium local spécialisé dans les troubles post-traumatiques de la Première Guerre mondiale. Il n’a aucune mémoire, ni présente ni passée. Pour ne pas sombrer, il essaye de se raccrocher comme il peut à tout ce qui l’entoure dans l’espoir de se construire une identité, mais c’est sans compter sur la rivalité de deux médecins qui se cristallise à son sujet.

Il poursuit ainsi son cheminement mental dans une errance onirique teintée de mythologie grecque avant de se trouver confrontée à une réalité brutale qui prend corps au travers de l’étrange docteur Bonne.


Mon avis

Codex Memoriae, Le sacrifice des âmes du purgatoire est un roman de Christophe Michaud, dont j’ai déjà découvert la plume avec Le sacrifice des dieux. En fait, ils sont les premiers d’une série de « Livres de souvenirs » et sont tous deux illustrés. 

Je me suis aperçue en recevant mon exemplaire « Le sacrifice des âmes du purgatoire » que la version numérique du « sacrifice des dieux » ne m’avait pas permis de profiter pleinement du roman et de son atmosphère, car l’objet livre a été travaillé avec grand soin, par soucis d’esthétisme, sans doute, mais aussi pour compléter l’atmosphère du récit et piéger le lecteur dès la couverture, couverture d’ailleurs superbe, qui donne au livre un cachet particulier. 
Le livre propose une police également assez spécifique, proche de la machine à écrire, rendant un peu difficile la lecture au début, pourtant on s’habitue vite, séduit par l’histoire, par la cohérence du fond et de la forme. Je n’ai pas particulièrement accroché aux photos (montages) proposées, mais là encore, elles ne sont pas gratuites et font partie intégrale du roman. 
Ce livre constitue donc un tout : chaque caractéristique citée se révèle complémentaire aux autres, offre un objet livre soigné et cohérent. Rien n’est gratuit, tout a un sens : au lecteur de s’approprier leurs particularités. 

L’histoire commence avec la création de la clinique du Dr Quine, qui ne manque pas d’ambitions et d’idées, et qui désire y développer des soins respectueux du patient, optant pour des méthodes plus humaines, moins barbares que celles utilisées à son époque. Ses envies sont louables et malgré un personnage banal, on s’y attache sans mal, lui souhaitant la réussite de son entreprise. 
Quand il rencontre le Dr Bonne, il pense avoir trouvé un confrère partageant ses idées et sa volonté de faire progresser l’humanité, cependant le lecteur sent immédiatement que le comportement du Dr Bonne et ses propos ne correspondent pas. 
Leur désaccord se révèle et s’enflamme jusqu’à la rivalité, lorsqu’apparaît un patient vagabond, amnésique et totalement passif. 
Ce patient profite donc du traitement des deux médecins, mais ce sont ses séances d’hypnose avec le Dr Quine qui le sortent du vide dans lequel il erre et nous offre ses visions de voyages oniriques, à travers la mythologie grecque. On ne découvre les traitements contestables du Dr Bonne que plus tardivement. 
Tous deux s’attribuent les mérites du moindre signe de guérison. L’arrogance du Dr Bonne s’affiche et prend une pénible assurance, tandis que le Dr Quine tombe dans la paranoïa. 
Christophe Michaud traite la caractérisation de ses personnages et leur évolution avec efficacité. Seul le patient vagabond reste une longue énigme aux yeux du lecteur, qui se réjouit de chaque découverte : autant de souvenirs énigmatiques qui ne lui appartiennent pas forcément, et qui comblent le vide l’entourant. Ce patient amène une dimension mystérieuse et envoûtante au récit, portée par la plume riche et poétique de l’auteur.
Christophe Michaud n’en néglige pas pour autant les personnages secondaires. Bien au contraire ! Ils se révéleront particulièrement importants dans l’intrigue, voire surprenants.

La narration amenée de manière cohérente apporte de la fluidité au récit, même si l’intrigue se révèle complexe. Reformer le puzzle demande l’attention du lecteur.
Quel que soit le point de vue, les descriptions sont particulièrement détaillées, le style développé. Celui du patient se pare d’émotions particulièrement bien transcrites dans ses voyages dans la Grèce antique. A côté, la rivalité des deux docteurs parait plus triviale, même si la tension apportée par ces deux personnages reste toujours palpable.
En effet, on se dirige du mystère à l’horreur. La tension psychologique du début évolue pour se transformer en une atmosphère glaciale. Latente, mais bien posée, elle s’emballe alors et imprègne le récit. Les mystères n’en disparaissent pas pour autant et le lecteur découvre bien des révélations jusque la fin du roman.

Ce qui m’a le plus marqué dans ce livre, c’est l’intention de Christophe Michaud d’accrocher le lecteur, de le piéger dans le roman, et on n’en sort pas indemne. L’immersion semble permise par la forme, autant que par l’histoire qui scotche vite le lecteur. Les efforts sur ces points et leur complémentarité marquent cette volonté d’apporter du crédit et du réalisme grâce à des subterfuges subtilement apportés : on a évoqué déjà les photos, la police de caractère, les descriptions détaillées et un style précis et riche. On peut citer également les rapports et lettres (censurés, ce qui rajoute au réalisme), en début et fin de récit. Le mystère ne s’en trouve que renforcé dans ce livre qui paraît plus qu’authentique !

En conclusion, on ne peut que saluer le travail de Christophe Michaud réalisé sur ce livre. L’histoire, bien que complexe fascine, fait rêver, voyager et frissonner : un savant mélange bien maîtrisé entre réalisme et mystère exacerbés. C’est un roman qui demande l’attention complète du lecteur, qui se mérite, avec la récompense d’une excellente lecture à la clé ! Je remercie Christophe Michaud et le forum Au cœur de l’Imaginarium.

samedi 25 juin 2016

Camden 1 - Un murmure de voix de Pauline Andreani




Résumé
Je m’appelle Humphrey. Simplement Humphrey. Ce soir-là, j’ai perdu mon travail en voulant sauver un ahuri qui prétendait pouvoir communiquer avec l’au-delà. Par curiosité, je l’ai ensuite suivi dans l’une de ses aventures, et devinez quoi ? Le gamin disait vrai.
La famille Flemington, s’étant vue affligée de la disparition de leur fils et de la mort de leur bonne, ne se doute pas que cette dernière est bien présente, ni qu’elle sait ce qui est arrivé à leur bambin. . .




Mon avis 


Un murmure de voix est le premier épisode de la série Camden de Pauline Adreani
L’auteur, artiste dans l’âme, puisqu’elle aime dessiner, jouer la comédie et possède déjà plusieurs BD à son actif, nous livre les aventures de Camden, spirite du début du XXème siècle.

C’est par une nuit d’hiver de 1935, que débute le récit et si Camden est bien le personnage principal de cet épisode, il n’en est pas le narrateur. 
Nous commençons donc la lecture du récit, rédigé à la première personne, avec la narration d’Humphrey, croupier de la Divine comédie. C’est en cette nuit particulière qu’il rencontre pour la première fois Camden Elmore. Sa vie s’en voit radicalement changée. On ne peut pas dire que le jeune homme lui porte chance pourtant, puisqu’il se fait virer de son job à cause de lui. Et si le « petit » ne paye pas de mine, il a de drôles d’informations à lui donner : un message de l’au-delà, parvenant d’un vieil ami décédé. Pour appuyer ses dires, il lui révèle le mot de code connu d'eux seuls.
Perturbé par ces révélations, mais restant sceptique, le narrateur décide tout de même de revoir Camden et c’est ainsi que l’aventure peut commencer. Humphrey devient, bien malgré lui, l’assistant du jeune spirite, qui préfère la couverture de médium, pour ne pas attirer l’attention sur ses dons particuliers : dialoguer avec les morts. 

Humphrey nous livre cette histoire de son point de vue, mais reste plutôt neutre, entre un scepticisme qui diminue au fil de l’intrigue et un brin d’admiration pour le jeune Camden au caractère bien trempé. Il apparaît comme un faire-valoir, tel un Watson racontant les enquêtes d’un Sherlock Holmes. La rivalité apparaissant entre Camden et son frère Nigel qui intervient dans l‘enquête en tant qu‘exorciste, leurs disputes fraternelles, naturelles et butées, laissent également un soupçon sherlockien. 

Pauline Adreani maîtrise parfaitement la caractérisation du personnage de Camden : un grand gamin un peu fantasque, arrogant voire froid dans ses analyses, ne se laissant pas emporter par ses émotions ou par l’ambition, motivé par l’enquête et par l’aventure spirite avant tout. Celle-ci surpasse l’aventure humaine et on ne peut pas dire qu’il fasse preuve de beaucoup de tact et de compassion pour la famille des victimes. Pourtant, il se comporte tantôt comme un gamin buté, capricieux, jovial, tantôt comme un adulte mature, instinctif et efficace. Il utilise son don avec perspicacité. Celui ci s’intègre à la personnalité du jeune homme, l’influence et s’en alimente. Il est essentiel dans l’intrigue.

L’enquête proposée est fort agréable à la lecture. L’auteure sait nous surprendre dans sa résolution et se sert à merveille de son spirite pour cela. Sa plume fluide, sa capacité à poser parfaitement descriptions, atmosphères et dialogues entraîne dans la lecture, scotche le lecteur au récit. Le fantasque Camden et la narration utilisée y contribuent également. 
J’ai aimé la conclusion, répondant à toutes les questions et résolvant les conflits entre les personnages. (sans doute provisoirement, tout au moins on l’espère, tant on s’amuse de leurs querelles) 

Ce fut donc une belle découverte et je lirai la suite avec grand plaisir !
Je remercie le forum « Au cœur de l’Imaginarium » et les éditions du Petit Caveau pour cette excellente lecture.

samedi 14 mai 2016

Dimension Arnauld Pontier, d'Arnauld Pontier



Résumé
Pointe nord de l'île. Une bande de terre épaisse et graveleuse séparait en deux l'embouchure de l'ancienne rivière : d'un côté, s'étendait à perte de vue un amas de galets noirs et gluants, de l'autre, un vaste espace pratiquement asséché - ce qu'il restait du lit de l'Hudson River. Sur la rive, la même bande de terre rapportée serpentait jusqu'au pied de l'espèce de tour monumentale qui trônait là, seul relief encore visible sur l'île, ultime vestige d'un temps révolu depuis des millénaires...

En 27 nouvelles, de fantastique et de science-fiction, pour la plupart inédites, vous allez croiser le diable, rencontrer la Mort, visiter d'étranges planètes, contempler le futur, découvrir, aux aguets, derrière la banalité du quotidien d'inquiétantes forces et faire connaissance avec des espèces extraterrestres qui ne nous veulent pas forcément du mal... Car la magie de la nouvelle, c'est cela : en peu de mots vous proposer de multiples et imprévisibles voyages.

Arnauld Pontier a publié une dizaine de récits et de romans, en littérature générale comme en littérature de l'imaginaire ; il a également participé à plusieurs anthologies et a dirigé Dimension Système Solaire. En 2004, il a obtenu le prix Marguerite Yourcenar pour La Treizième cible. Son dernier roman, Agharta - Le temps des Selkies a été finaliste du prix Rosny Aîné 2014.



Mon avis 

Auteur de romans, récits, nouvelles et poésies, Arnauld Pontier a également dirigé l’anthologie de science-fiction Dimension système solaire.
On le retrouve avec sa propre anthologie Dimension Arnauld Pontier mêlant deux genres : science-fiction et fantastique.
Pour introduire celle-ci, il rappelle au lecteur de ne pas confondre la nouvelle avec une histoire courte. Elle possède ses particularités : courte, mais efficace, elle crée une atmosphère particulière, capture immédiatement le lecteur, son attention, contrairement au roman, qui le mène sur la longueur grâce au développement de son intrigue. L’intention et la lecture de ceux-ci sont donc différentes.
Philippe Ward, dans sa Post-face appuie l’idée de cette spécificité, et du plaisir de la lecture. Il témoigne du savoir faire de l’auteur, sur ce format et dans les « mauvais genres ». 

Dans son anthologie, l’auteur présente chaque nouvelle, les remet dans leur contexte : écrites selon l’inspiration ou pour un appel à textes, usant de thèmes qui lui tiennent à cœur.
Celles ci sont bien construites : l’auteur mise sur les classiques et apporte une atmosphère détaillée, claire et permettant l’immersion immédiate. S’il s’appuie sur les codes connus des lecteurs de science-fiction et de fantastique, il ne se laisse pas aller aux clichés, gardant sa touche personnelle. Il apporte un message, une idée, se pose sur une situation donnée, sur un moment, un instant précis.
Le lecteur se trouve vite happée par l’histoire, pour certaines plus que d’autres, selon ses goûts, ses préférences littéraires, mais chacune sait se montrer efficace, avec une écriture précise et claire.
Si l’auteur présente son intention, et les messages qu’il veut faire passer en introduction, il ne spoile pas pour autant, et arrive bien souvent à surprendre le lecteur malgré lui.
Les fins se présentent sous forme de chutes toujours soignées, et se concluent de manière plus ou moins efficace. Elles sont généralement noires, sombres et sans espoir, mais tombent parfois un peu à plat. Certaines nouvelles de l’anthologie m’ont scotchées plus que d’autres, même si toutes restent agréables à la lecture.

Arnauld Pontier trouve influences et inspirations dans diverses ressources. S’il s’appuie sur un mythe serbo-croate pour l’une de ses nouvelles, il sait aussi se servir des mythes et légendes conférant un statut et un pouvoir particulier aux chats ou aux hibou. Il s’attarde aussi sur le phénomène de l’effet papillon. S’il rend hommage à LovecraftJean RayPhilipe K Dick ou Boris Vian, il sait aussi s’inspirer du cinéma avec le filmPrédator. Les sources sont donc très variées et bien d’autres idées viennent alimenter son imaginaire et enrichir son univers.

Plusieurs thèmes ressortent dans l’anthologie.
L’homme s’y voit souvent puni pour sa stupidité (les guerres et conflits destructeurs, ses habitudes nocives, telle son avidité démesurée). Ce peut être la nature qui reprend ses droits suite aux conflits. Même les éléments peuvent se rebeller : l’eau, le sable. Des planètes vivantes les piègent pour satisfaire leurs propres intérêts, leurs propres besoins. Ce peut être également des créatures surnaturelles qui prennent leur revanches ou des extra-terrestres qui prennent le contrôle, envoûtent et créent des pièges élaborés. La prise de pouvoir peut se faire perfidement : une invasion facile sur le long terme qui mène à l’extinction de la race humaine. 
L’auteur exploite aussi le pouvoir de créatures jugées insignifiantes, faisant parti du quotidien, dont on ne conçoit pas la dangerosité : les chats (et leur don), les chiens (qui servent de catalyseur pour l’éveil des humains), le hibou (porteur de malédiction) et la femme charmante (mais fatale au double sens du terme). Les sceptiques avides et matérialistes voient leurs certitudes s’ébranler et en paient le prix. Ceux qui désirent croire goûtent à de réels moments de bonheur .
Le temps s’avère parfois un élément à part entière de la nouvelle. Manipuler et rembobiner le temps propose un éternel recommencement. Les boucles dans le temps sont autant de chances données, ou peut être un jeu à grande échelle, une expérience ? 
La quête d’identité se complexifie quand le corps se métamorphose, ou quand le clonage est en jeu : comment savoir se différencier entre modèle et clone. 

En conclusion, j’ai découvert dans l’anthologie Dimension Arnauld pontier, un univers qui lui est propre, des thématiques classiques mais traitées avec sa touche personnelle et souvent avec originalité. Le mélange science-fiction et fantastique m’a beaucoup plus. Si j’ai apprécié les nouvelles de manière inégale selon ma subjectivité, chacune est écrite et construite avec soin. 
Je remercie le forum Au cœur de l’Imaginarium et les éditions Rivière Blanche pour cette excellente découverte.

mercredi 11 mai 2016

Le Brasier, de Virginie Buisson-Delandre




Résumé

Vampire, mort-vivant, esprit maléfique ou autre aberration défiant la nature, le monstre reste une figure centrale de la littérature fantastique teintée parfois d’épouvante.
Mais le monstre n’est pas toujours celui auquel le lecteur s’attend...
C’est ce que ces nouvelles tendent à nous faire découvrir, chacune à sa manière, reprenant les sentiers battus du genre fantastique pour mieux nous emmener sur les chemins de traverse hantés par une folie latente, tapie dans l’ombre, qui n’attend que le moment propice afin de mieux se jouer des personnages trompés par des certitudes volant en éclat.

Mon avis

Virginie Buisson Delandre, déjà auteure d’autres nouvelles (publiées individuellement) inspirées par ses lectures fantastiques classiques, a également puisé dans ces influences pour écrire le recueil de nouvelles Le Brasier.

Le recueil reprend, pour chaque nouvelle, une formule assez classique et linéaire pour la construction du récit, mais de manière tout à fait efficace. La mise en place du fantastique se fait de manière progressive avec une entrée du surnaturel dans la réalité, et des informations dévoilées au lecteur de manière pertinente et judicieuse. Les personnages du recueil voient leur vie peu à peu bouleversée par des événements, amenant des perturbations surnaturelles, qui les capturent comme des proies dans une toile d’araignée, tissée à la fois sur le fond et sur la forme, par les fils du récit et par leur tourmenteur.

L’atmosphère est, dans ce sens, toujours mise en place avec grand soin, par la richesse des descriptions, des lieux et des émotions des personnages. On assiste, ici encore, à une progression dans la mise en place même du recueil. Chaque nouvelle plonge le lecteur toujours plus loin dans l’angoisse, et le mène même jusqu’au cauchemar. On frissonne avec des ambiances morbides, sombres, terrifiantes. On tombe ensuite dans le carnage avec plus de sang et de viscères vers la fin du recueil. Seule la dernière nouvelle pourrait sonner comme une fausse note dans cette répartition, misant plus sur une ironie sournoise. Le lecteur peut facilement s’immerger. Si la tension monte au fil de la lecture, l’attente se révèle d’autant plus grande au début de chaque nouvelle.
Les influences d’auteurs fantastiques classiques restent toujours présentes et certains sont même cités à titre de références dans la première nouvelle.

Le style de l’auteure contribue à l’immersion du lecteur par une plume fluide et un vocabulaire approprié. La lecture en est donc d’autant plus agréable.

Dans chaque nouvelle, on retrouve un thème commun : la frontière mince entre réalité et dimension fantastique (ou même démoniaque). Elle devient tellement floue qu’elle amène la perte de repères entre rêve et réalité, des doutes à la folie. Les victimes s’avèrent plus ou moins consentantes du sort qui les attend : poussées par l’ignorance, la malchance ou la folie ! Les narrateurs sont parfois témoins, parfois victimes de cette folie, ou de la cruauté et du sadisme de leur bourreau, car leurs ennemis surnaturels aiment jouer avec leurs proies, les torturer, les tuer à petit feu et ne s’en privent pas.

Les fins, même si elles varient, donnent aux lecteurs matière à réfléchir et à frissonner : le piège se referme inexorablement sur leur proie, comme sur le lecteur.

En conclusion : même si le recueil ne donne pas dans l’originalité, il prend ses sources dans la littérature fantastique. Son efficacité, la fluidité de son style le rendent agréable à la lecture. Chaque nouvelle diffère de la précédente, tout en possédant des thèmes communs. En effet, elles embarquent le lecteur dans des récits sombres et morbides. Je remercie le forum Au cœur de l’Imaginarium et les éditions l’Ivre-book pour cette agréable et effrayante lecture.

jeudi 14 avril 2016

Let the Sky Fall tome 2 : Let the Storm Break, de Shannon Messenger


Résumé

Deuxième volume d’une trilogie young adult fantastique, Let the Storm Break nous plonge dans l’histoire tourmentée de Vane Weston, qui s’est découvert le don de maîtriser les vents. Aux côtés d’Audra, la jeune sylphe chargée de sa protection, il a appris à apprivoiser ses pouvoirs et survécu à un affrontement homérique avec l’ennemi. Mais parce qu’ils ont cédé à l’attirance qui les poussait l’un vers l’autre, les deux adolescents sont désormais liés, et détiennent ensemble le pouvoir des quatre vents, convoité par le terrifiant Raiden. Les voilà donc en proie à un terrible dilemme : révéler leur secret aux autre sylphes pour leur permettre de gagner la bataille, ou s’entêter à protéger l’arme ultime, au risque de tout perdre ?

Mon avis


« Let the storm break » est le tome qui suit « Let the sky fall », série Young adult de Shannon Messenger, tous deux publiés chez les éditionsLumen.
Comme pour le premier tome, une superbe couverture invite immédiatement à la lecture : l’objet livre est magnifique.
L’auteure entre dès le début dans le vif du sujet. Elle laisse le lecteur se réinstaller confortablement dans l’histoire, sans insister lourdement sur les faits déroulés lors du premier tome. 

« Let the storm break » ne peut donc pas être lu indépendamment et se pose comme une suite logique. Si le premier tome évoque l’initiation proposée par Audra et vécue par Vane, la découverte pour celui-ci, comme pour le lecteur d’un peuple des vents aux pouvoirs particuliers, ce deuxième tome récolte les fruits d’une mise en place solide, basée sur un univers original et intéressant. Il propose par conséquent plus d’action et d’approfondissement, sur les personnages, les sylphes et leur ennemi Raiden. 

La narration alterne très judicieusement (tout comme dans le premier tome) les points de vue d’Audra et de Vane. Sa dynamique et le style fluide de l’auteure rendent la lecture d’autant plus agréable. 

Ces deux personnages principaux ont également évolué suite au premier tome. Vane apparaît plus fort et plus sûr de lui. Il apprend à connaître son peuple et le monde dont il est issu, mais reste maître de son destin. Même s’il doute sur ce que ce sera son avenir, entre ses sentiments pour Audra et ses responsabilités de futur roi, il se montre déterminé et audacieux. 
Audra, dont il est séparé au début de ce tome, a perdu son rôle de gardienne et s’aventure dans des contrées insoupçonnées, découvre des secrets importants pour l’intrigue. On la retrouve tout aussi forte et pourtant plus sensible, un peu plus fragilisée par la « trahison » qu’elle a commise envers son peuple, quand elle a embrassé son protégé et créé un lien avec lui. Les doutes l’assaillent. Ça ne l’empêche pas de voir ses pouvoirs évoluer, gagner en puissance et s’affiner.

La situation devient d’autant plus difficile à gérer pour eux avec l’apparition d’autres personnages : les nouveaux gardiens et amis de Vane, ainsi que Solana, sa jolie « fiancée », ou tout au moins est-elle désignée comme tel par les Sylphes. Si Vane refuse cette union arrangée, la voir en chair et en os ne l’aide pas, surtout qu’elle l’a attendu, tout comme on attend le prince charmant, et comme le sauveur de son peuple, depuis sa plus tendre enfance.
Face aux doutes, et face aux pressions de la réalité, la relation entre Vane et Audra connaît donc des turbulences et ne peut qu’évoluer. 

Ce volume s’avère plus trépident que le premier, avec de l’action et des révélations, des décisions qui influent sur l’avenir des sylphes et de nos deux jeunes héros. 
Leur ennemi Raiden prend forme. On en apprend un peu plus sur son passé, par le biais de ses anciens amis, sur son avidité et son ambition, mais aussi sur les moyens dont il dispose pour augmenter sa puissance : ce qui fait de lui un ennemi redoutable. Il intervient enfin en personne dans ce tome.
Le roman se termine d’ailleurs sur un terrible cliffhanger qui tient le lecteur en haleine et donne envie de crier « Je veux la suite ! »

L’univers créé par Shannon Messenger révèle, une fois encore, toute sa richesse et elle nous surprend avec de nouvelles stratégies, de nouvelles attaques liées au vent : elle maîtrise parfaitement son univers et l’approfondit toujours un peu plus. On apprécie un lexique développé autour des vents, riche et imagé. Ainsi la lecture, loin d’être répétitive par rapport au premier tome, nous apporte une plume toujours poétique, efficace et forte.

En conclusion : si j’ai apprécié le premier tome « Let the sky fall », ma lecture de ce deuxième tome « Let the storm break » , fut plus passionnante encore et j’ai hâte de pouvoir lire la suite ! 
Je remercie le forum Au cœur de l’Imaginarium et les éditions Lumen pour cette excellente lecture.

samedi 2 avril 2016

Le Crépuscule des rois, d'Arnaud Cuidet


résumé:
Sasha est une new-yorkaise d'une trentaine d'années au passé de loubarde. Au cours d'une rixe, elle découvre un anneau qui la transporte sur une planète étrange : Nalaâm. Elle et l'anneau sont désormais liés.

Capturée, elle combat dans une arène de gladiateurs. Elle découvre que son anneau lui confère une force incroyable, mais uniquement pendant ses accès de colère. Sasha finit par s'évader de l'arène et découvre un monde en proie à une guerre terrible : l'Empereur Tarkass veut régner sur tous les royaumes. Sasha sera propulsée au milieu des combats, qui sonneront le glas de bien des monarchies et ouvrira une nouvelle ère, celle du CREPUSCULE DES ROIS.


Mon avis:

Lorsque le partenariat a été proposé pour ce roman « Le crépuscule des rois », j’ai un peu hésité à m’inscrire. Le résumé me semblait alléchant, mais la couverture, certes superbe, ne correspondait pas à mes attentes : un personnage légèrement vêtu, dont la posture sur la moto met en avant ses charmes féminins… J’ai tout de même tenté, misant sur la qualité des romans SF de Rivière Blanche, qui ne m’ont jamais déçu. Bonne décision, puisqu’il aurait été dommage de passer à côté du personnage principal de l’histoire, Sasha, héroïne aucunement semblable au stéréotype féminin renvoyé par la couverture. 

Bien au contraire !

Sasha, jeune femme originaire de Brooklyn, grande et athlétique se fait agresser et s’échappe grâce à un anneau, qui la téléporte immédiatement dans un autre monde, où elle est une « élue » (porteuse d’anneau).
Capturée, elle devient gladiatrice, puis simple guerrière. Elle s’adapte vite grâce à son fort caractère et son expérience de la « baston » acquise dans les rues de Brooklyn. Sasha se révèle être une femme forte, têtue, belle et rebelle (mais ce n’est pas son physique son atout principal), souvent provocatrice, voire insolente, mais toujours pour de bonnes raisons. Impossible de de ne pas apprécier ce personnage bien construit et nuancé, riche, possédant des valeurs et un code de l’honneur qui lui est propre. C’est une vraie Héroïne, qui sait faire preuve de générosité et compassion, se bat pour la justice et la défense des opprimés. Certes rien d’original à première vue, mais totalement nouveau dans ce monde qui néglige son peuple. 
Son rôle d’élu et son fort tempérament, ses actions héroïques forcent l’admiration : celle du peuple, aussi bien que celle des rois, ou de ses ennemis, et celle du lecteur bien évidemment !

Le lien qu’entretient l’élue avec son anneau, très particulier et original, est bien mis en place. Elle l’appelle « Sauron » par dérision et on sourit à cette évocation. Si elle se sert de l’artefact, elle lutte également contre son influence. Celui-ci se sert de sa colère qu’il catalyse pour décupler ses forces, mais lui ôte toute limite et l’entraîne à tuer ses ennemis. 
Sasha éprouve des remords pour les meurtres qu’elle commet (même si justifiés par la bataille). Ce côté très humain et sensible de Sasha, la rend d’autant plus sympathique aux yeux du lecteur.
Pourtant, on se demande qui influence qui, de l’élue et de l'artefact.

La narration à la troisième personne, très bien menée, livre du point de vue de Sasha, ses émotions et interrogations, ses angoisses et sa détermination.
Si l’intrigue suit ses pas pendant une grande partie du récit, les points de vue se diversifient quand les événements finaux s’enchaînent. Ce changement demande un temps d’adaptation au lecteur, mais apporte des informations intéressantes sur les personnages secondaires.
La narration est vive, parfois rapide, alternant des scènes diverses entre combats, descriptions de l’univers et de l’état d’esprit du personnage. C’est tout de même l’action qui domine dans le roman.

Les personnages secondaires, également bien caractérisés s’avèrent tout aussi intéressants que notre héroïne Sasha. Les relations que celle-ci entretient avec eux, réalistes, évoluent, se renforcent en amitiés fortes et même en sentiments fraternels et amoureux : ils apprennent à se connaître entre alliances et traîtrises. 

L’univers du roman, pas forcément original, reste cohérent.
On découvre avec Sasha les cités et royaumes, leurs dirigeants, et même si certains deviennent des amis, elle n’oublie pas que la population reste la victime principale des guerres qui les opposent. Si elle participe aux batailles, c’est pour la défendre et limiter les dégâts, non pour prendre parti dans les batailles de pouvoir.
Dans cet univers rongé par la guerre, des temples, où sont conservés de précieux artefacts, apportent un élément original et crucial dans l’intrigue. L’auteur ajoute également une touche technologique avec des énergies particulières, entre vibration et pulsation : on découvre ainsi des vibrajets (moto de la couverture), des vibranefs etc…

En conclusion : j’ai adoré le personnage principal du roman (qui m’a d’ailleurs fait rire par ses réparties savoureuses), une femme forte et généreuse, une véritable héroïne sans qu’on ne tombe dans le cliché.
Mon seul bémol serait l’intrigue simple et un peu prévisible, mais l’auteur fait la part belle aux personnages et ce serait dommage de ne pas faire leur connaissance. Un roman SF avec une Vraie Héroïne, ce n’est pas si courant et je le recommande ! 
Merci au forum Au cœur de l’Imaginarium et à Rivière Blanche pour cette très belle lecture.