lundi 22 septembre 2014

Manhattan Ghost, de Philippe Ward et Mickaël Laguerre





Résumé

Elle attendit que son cœur reprenne un rythme normal avant de se décider à gagner le bar. Elle allait être en retard maintenant. 
— Bonjour Lisa. 
La jeune femme se retourna brusquement, surprise d’être ainsi abordée dans ce quartier. 
— Peter, mais que fais-tu ici ? Elle s’arrêta soudain, consciente de l’incongruité de sa question. Peter Monoghan était décédé trois ans plus tôt d’un cancer généralisé dû au surmenage, à l’alcool et surtout à l’abus de cigarettes. Et il se trouvait face à elle, vêtu du costume bleu que Lisa lui avait toujours connu. Ses épaules étaient plus voûtées, son visage plus pâle que dans ses souvenirs. Il lui souriait.
 — Tu es resplendissante, comme toujours.

Lisa Kilpatrick, une pure New-Yorkaise, travaille dans la police, mais sa véritable passion demeure la musique. Un soir par semaine, après son service, elle joue du piano et chante dans un club new-yorkais. Un jour, elle assiste au Manhattanedge. Un soir par an, le soleil couchant se retrouve juste au milieu de la 14th Rue, dans un alignement parfait vers l’Ouest. Et là, elle va basculer dans un autre monde, celui des Fantômes de Manhattan.

Manhattan Ghosts est un hymne à New York. À travers des photos et un texte, c’est toute la grosse pomme que vous dévoilent Mickaël LAGUERRE et Philippe WARD.


Mon avis

Avec Manhattan GhostPhilippe Ward et Mickaël Laguerre nous proposent de redécouvrir le vrai visage de New York. Ce n’est pas l’optique touristique qui y est prégnante. En effet, on n’y trouve pas une visite guidée de lieux populaires, mais une immersion dans un New York caractérisé par sa constante effervescence, son histoire, sa structure et sa culture. Les deux artistes dépassent l’image superficielle, populaire et touristique, pour s’attacher à son « vécu », à ses habitants, ainsi qu’aux valeurs qu’elle véhicule.
Dans ce sens, la nouvelle et les photographies s’avèrent complémentaires et efficaces : le lecteur se retrouve plongé au cœur de la ville et plus précisément dans le quartier de Manhattan dès les premières pages.
Le livre, se composant de doubles pages images-texte (chacun se tenant sur une pleine page, face à face) gagne donc son efficacité par son organisation. Loin de tenir le simple rôle d’illustrations pour les photos ou de simple accompagnement écrit pour la nouvelle, les deux possèdent leur propre cohérence, et grâce à leur complémentarité, insufflent l’esprit new-yorkais au fil des pages.

Dès que l’on tourne les pages, les photographies de Mickaël Laguerre nous invitent au voyage. Celui ci diversifie les situations et les angles de prise: vues aériennes, moments d’animation des rues, scènes prises sur le vif, monuments et bâtiments célèbres ou plus anonymes, scènes diurnes ou nocturnes. Les couleurs et les jeux de lumières subliment également certaines de ces photographies. D’ailleurs, qu’elles soient en couleurs ou en noir et blanc, chacune d’entre-elles porte une part de l’âme des lieux. Elles sont vivantes et semblent vouloir partager avec le lecteur des instants d’intimité figés dans le temps.

La nouvelle nous aide également à entrer dans la ville et plus précisément dans le quartier de Manhattan, en compagnie de Lisa. Personnage principal de la nouvelle, elle s’avère un personnage riche et bien construit, que l’auteur prend le temps de nous présenter et que l’on accompagne avec plaisir. Pure New-yorkaise, malgré ses origines irlandaises, qui lui valent une jolie chevelure rousse, elle aime New York, ses rues et son animation et nous fait partager son affection. Si le départ reste très réaliste, assez proche de l’image que l’on se fait de la ville, l’histoire vire bientôt au fantastique, quand Lisa se retrouve dans un New-York parallèle peuplé de fantôme. Elle oublie les crimes horribles sur lesquels elle enquête dans la réalité pour se consacrer à une énigme bien différente, puisqu’il s’agit de résoudre la disparition de John Lennon. L’auteur nous emmène donc dans ce New York parallèle, à la fois si particulier, mais finalement si peu différent et ponctue son récit de personnages célèbres et de références musicales, artistiques et culturelles. Si certaines me sont inconnues, d’autres sont très évocatrices et contribuent à intensifier l’esprit new-yorkais que les auteurs ont voulu transmettre.
La musique tient d’ailleurs une place importante dans le récit. Chaque chapitre débute avec en introduction les paroles de chansons. Si elles vous sont familières, elles vous trotteront dans la tête pendant la lecture ou en admirant les photographies, sinon, vous pourrez toujours faire de belles découvertes en visitant le site consacré à New York (et par conséquent au livre) proposé par les deux artistes : http://visiondenewyork.photos/
La musique apparait également dans la nouvelle comme un rêve, un moyen d’évasion et, on le devine, d’évolution (voire de révolution) dans la vie de Lisa.
Le style fluide de l’auteur agrémente le voyage. Seulement la résolution de l’intrigue semble un peu rapide (voire facile). On quitte pourtant Lisa à regret, tant elle s’est révélé un personnage attachant et un agréable guide et on garde le sourire, car on peut deviner que la magie de New-York saura opérer et lui accorder des jours meilleurs.

En conclusion : je me suis laissée séduire par la vision de New York proposée par Philippe Ward et Mickaël Laguerre. Photos, texte, références musicales, culturelles et artistiques contribuent à dévoiler toute la richesse et les nuances de New-York. Immersion totale assurée !



mardi 16 septembre 2014

Le Testament de Galilée – 1. L’oeil, de Sébastien Tissandier



Résumé

Nous sommes tous génétiquement différents. Nos capacités dépendent de notre patrimoine génétique. Et ce n’est pas Jules Galio qui dira le contraire : il est l’assistant de recherches d’un des Professeurs les plus renommés dans le domaine de la génétique.

Mais lorsque la NASA fait appel à eux pour étudier le génome d’individus aux capacités particulières, Jules est loin de se douter que sa vie est sur le point de basculer : ces individus sont mystérieusement assassinés par une organisation se faisant appeler « Les Originels ».

Jules et ses compagnons partent en quête des survivants, mais ce qu’ils découvrent est sur le point d’ébranler leurs certitudes et les amène à se retrouver impliqués dans un affrontement lié aux travaux de Galilée il y a plus de 400 ans !

Entre amitiés, passions, trahisons et affrontements, seules les capacités pourront faire la différence !


Mon avis

On entre sans mal dans le récit mené à la première personne. Nous faisons la connaissance de Jules Galio, assistant du professeur Lombard, chercheur au CNRS.
De premier abord deux choses peuvent déstabiliser:
- ne pas se trouver du point de vue de l’un des mutants (le résumé alléchant donne envie de se lancer aussitôt dans l’aventure avec l’un de ces êtres modifiés génétiquement), et on ne s’attend pas à assister d’entrée de jeu aux discours et explications scientifiques de chercheurs.
- ce même discours scientifique peut également gêner le lecteur, car trop développé et simplifié, il semble peu naturel. En effet, la discussion entre les scientifiques reste artificielle, tant elle cherche à se placer à la portée du lecteur. 

Malgré ces petites gênes au démarrage, Sébastien Tissandier réussit à emporter le lecteur par sa plume maîtrisée et agréable et on se retrouve vite piégé par le livre, car l’aventure arrive et elle s’écrit avec un grand « a ». Si l’installation de Jules dans ses quartiers et dans l’intrigue prend son temps, des chapitres transitoires avec changement de narrateur nous permet de découvrir et d'accompagner les mutants, victimes d’un mystérieux groupe d’illuminés aux intentions obscures, cherchant à les supprimer un par un. 

La toile de l’intrigue se met vite en place et on s’aperçoit que Sébastien Tissandier en tient les fils de manière sûre et efficace : si elle reste simple, elle est cohérente et maîtrisée, agréable à suivre, d’autant qu’elle apporte son lot de surprises, car les rebondissements ne manquent pas. 
Grâce à son style vif et assuré et une mise en place nerveuse du récit, notamment grâce à des chapitres courts, des descriptions bien dosées qui s’insèrent avec naturel et des dialogues vivants, le lecteur se régale et ne lâche plus sa liseuse jusqu’à la fin de ce premier tome.

On retrouve cette simplicité de l’intrigue dans le schéma « gentils » et « méchants ». Mais, si le lecteur se laisse gentiment embarquer, il est vite mis à mal : entre les suspicions et trahisons, mais aussi la cruauté des dits méchants (même s’ils répondent à des clichés assez courants) qui gagnent leur crédibilité par leurs actes ignobles. 
Du côté des « gentils », Sébastien Tissandier réussit parfaitement à rendre ses personnages attachants. Il parvient à retranscrire et à faire partager leurs sentiments, sans jamais tomber dans le larmoyant, mais avec sincérité, pudeur et intensité. Le lecteur n’a aucun mal à s’identifier à eux, à comprendre et ressentir leurs émotions: amitié, amour, confiance, et loyauté. 
Les touches d’humour et de moments de tendresse (amicale et familiale) ponctuent également le récit et allègent la tension… mais n’est-ce pas pour mieux tenir encore le lecteur et le plonger dans la peur et finalement dans l’horreur ? On tremble pour les personnages que l’on a appris à aimer et Sébastien Tissandier ne les épargne pas. 

En conclusion : même si j’ai eu un peu de mal à entrer dans le roman, une fois qu’il m’a happée, je ne l’ai plus lâché. Je suis restée bluffée par la maîtrise de l’auteur. Sébastien Tissandier tient sans mal son lecteur, grâce à une intrigue simple, mais efficace, des personnages charismatiques et un style fluide et agréable. J’ai passé un excellent moment à la lecture de ce premier tome du testament de Galilée et je lirai la suite avec plaisir.

Merci au forum Au cœur de l'Imaginarium et au éditions L'ivre-book pour cette belle découverte.

lundi 8 septembre 2014

Poupée de chair d'Isabelle Lorédan



Résumé
Histoire d'amour dans laquelle les sentiments profonds de deux êtres s'expriment dans une relation de domination, Poupée de chair est un récit érotique intense et émouvant.


De la rencontre de Claude dans les années 1960 jusqu'à l'époque contemporaine, les années s'écoulent, riches d'expériences. Claude pousse Solana à franchir progressivement certaines limites, de la simple fessée au fouet, d'une corde qui enserre son corps au port d'un collier définitif, signe de son entière soumission.



À travers un récit à la première personne, Solana évoque le couple atypique qu'elle forme avec son maître, qui est aussi l'homme de sa vie : cinglant, attachant, et avant tout aimant.



« Le temps que nous passions l'un sans l'autre était devenu pesant tant pour lui que pour moi. »



Isabelle Lorédan est l'auteure de plusieurs nouvelles, dont Un, deux, trois... Nous irons en croix et Que la chair exulte ! Elle s'attache à narrer des situations où une femme trouve un épanouissement à travers la sexualité et le lien qui l'unit à autrui, homme ou femme.

Mon avis
« Poupée de chair » se présente sous la forme d’un témoignage fictif, écrit à la première personne. Cette nouvelle offre une immersion dans la vie d’une femme qui relate son expérience, s’exprimant avec sincérité et émotion, sans tomber dans la vulgarité.
A la lecture, on ressent la volonté de l’auteur de transcrire avant tout une histoire d’amour vraie et des pratiques D/S plus proches de la réalité (ce qui n’enlève rien à leur caractère intense et réservé à un public averti): Isabelle Lorédan y évoque la passion d’un couple engagé à la fois dans une relation stable et intense et dans une relation dominant/soumise. Celle ci se construit donc dans la durée et le sérieux. Elle suit par conséquent une évolution progressive et logique, et répond également à des codes impliquant le respect des désirs et de la volonté de l’autre. Elle se transforme même en véritable initiation pour la jeune femme qui, de toute sa vie ne connaîtra pas d’autre « Maître » et apprend tout de son compagnon.
Malgré une évolution cohérente, on regrette un peu que la jeune femme ne fasse part d’aucune hésitation, quand il s’agit de se lancer dans cette relation ou dans les séances proposées. Même si cette insouciance correspond à son caractère et fait partie de l’histoire du couple, car savoir se livrer et avoir une confiance absolue en l’autre constitue le fondement de leur amour et de leur relation, on aurait pu imaginer que quelques doutes subsisteraient avant qu’elle ne se livre totalement. L’acceptation paraît presque trop facile et le personnage semble alors dénué de toute volonté.
On passe pourtant outre ces détails, car Isabelle Lorédan parvient à nous présenter un personnage, qui même dans les situations les plus extrêmes, se sent belle sous le regard de son amant.

Le récit proposé est pensé et construit : même s’il s’agit du témoignage d’une vie entière, on ne s’ennuie pas. L’auteur alterne scènes plus intenses et moments tendres du quotidien, qui donnent à la fois du rythme et de la consistance à l’amour du couple. J’aurais parfois aimé avoir un aperçu plus approfondi de leurs discussions, leur ressenti et leurs conséquences sur les séances suivantes.

En conclusion, ce fut une lecture agréable. J’aurai pourtant apprécié que certains points soient approfondis pour m’aider à mieux comprendre encore ce couple. Pourtant, l’auteur a su retranscrire leur amour et leur passion grâce à un récit bien construit, rythmé et bien écrit.
Je remercie le forum Au coeur de l'Imaginarium et les éditions Dominique Leroy (collection e-ros), pour cette belle lecture.

samedi 6 septembre 2014

Terre zéro Jean Bury

Terre zéro - Jean Bury

Résumé
Paris, dans les années 2040 
Christophe Vrécourt vient de se faire embaucher chez Impérium Industries. Le projet qu’on lui propose est si alléchant qu’il ne peut refuser le poste malgré la réputation douteuse du groupe. 
Seulement, quand Christophe se rend compte qu’Impérium est bien plus avancé qu’ils ne voulaient le dire sur le sujet, il commence à se poser des questions. L’intelligence artificielle sur laquelle il devait travailler est en fait un androïde plus vrai que nature. Thomas, 15 ans. 
Mais qu’est vraiment Thomas ? Et qu’est le vrai projet que semble dissimuler Impérium 
Industries ? 
En quête de vérité, Christophe mettra à jour le secret bien gardé du géant industriel. Un secret innommable qui dépasse en horreur tout ce qu’il aurait pu imaginer.

Mon avis
Terre zéro démarre par un moment clé du récit: le kidnapping (ou une évasion, tout dépend de quel point de vue on se place) d’un enfant  dans un illustre laboratoire de recherche. Cette scène privilégiant l’action, une narration et des dialogues soignés scotchent le lecteur à sa tablette dès les premières pages.
L’auteur remonte ensuite le temps pour nous expliquer les motivations du kidnappeur Christophe Vrécourt, chercheur en sciences du comportement. Il le présente: sa vie, son travail, ses recherches, avant que n’arrive Thomas (l'enfant), puis met progressivement en place la relation qui s’établit entre eux, ainsi que les enjeux véritables qui se cachent derrière cette première scène.

Si l’histoire peut paraître basique au premier abord, elle se complexifie vite. D’autres personnages capitaux pour l’intrigue viennent s’en mêler: la mère de Christophe, elle-même à la tête d’un grand groupe de recherches dont le passé semble bien trouble, mais aussi une médium, dont les visions de fin du monde, d’abord décrochées du récit s’insèrent dans l’intrigue, et apportent un éclairage différent sur l’histoire de Thomas.
De nombreux personnages, également très soignés, les rejoignent rapidement. Ils trouvent parfaitement leur cohérence dans le récit et possèdent tous leur propre histoire, leurs propres motivations et objectifs, influant de manière directe ou indirecte sur l’intrigue principale. On s’attache à chacun d’entre eux, même si la relation privilégiée reste celle des deux personnages principaux : Thomas, le jeune garçon et Christophe. J'ai pris plaisir à suivre ces personnages et à découvrir leurs petits secrets, ainsi que  le dénouement que l’auteur leur réserve. Celui ci ne néglige d’ailleurs pas les intrigues secondaires. Celles ci se développent et d’autres s’y ajoutent (bonds dans le passé: l’histoire rattrape le présent, les conflits passés influent sur la vie des protagonistes), et apporte des réponses à chacune d’entre elle.

Le concepts de Stase et  de Terre zéro sont de belles découvertes. Et, si l’auteur utilise des codes (voire des clichés) propres à la Science Fiction (les clones, les guerres industrielles et mondes parallèles), il les exploite avec intelligence. Si on ajoute à cela une intrigue maîtrisée, développée et exploitée avec profondeur, on comprend pourquoi le roman a su gagner sa propre originalité .

En conclusion, je me suis laissée porter par la plume très agréable de l’auteur jusqu’au dénouement final. Impossible de lâcher le livre une fois commencé, tant j'étais captivée par l'intrigue et les personnages. Je remercie le forum Au cœur de l’Imaginarium et les éditions House Made Of Dawn pour cette excellente découverte: Terre zéro est un véritable coup de cœur !