vendredi 15 janvier 2016

Journal d'une infection, de Roman H Grey



Résumé
Les zombies de Roman H.Grey ne mangent pas de cervelle humaine en avançant les bras tendus. Ils sont complètement ancrés dans la réalité et donc bien plus tragiques. 

Le ZCV, nouveau virus sexuellement transmissible transforme ses victimes de manière pernicieuse, autant physiquement que psychologiquement. 

L'ombre du sida rôde sur ce texte incisif et personnel qui offre une version fraîche du
 genre zombie.

Mon avis
Journal d’une infection est, comme l’indique le titre, le journal intime d’un malade. Le narrateur nous présente donc au fil du temps (à la première personne) l’évolution de sa maladie, ses symptômes, sentiments et émotions. Cette maladie s’avère bien spéciale puisqu’elle transforme les infectés en zombies. Pourtant, elle fait partie intégrante de la société: à l’hôpital, un service et des traitements spécifiques y sont consacrés. On dépiste le virus (qui est en fait une MST). On traite et soigne, dans la mesure du possible, les infectés. Les malades ne sont pas pour autant bien acceptés par la société, et plutôt rejetés et marginalisés. 

Notre narrateur apprend la nouvelle de sa maladie et passe vite du choc de la nouvelle, à la culpabilité, la colère et la honte, mais c’est une maladie qu’il a déjà affronté, car vu évoluer chez un de ses proches. Il sait que sa vie va changer, anticipe et prépare la suite des événements. La description de ses sensations et émotions se mettent en place naturellement, progressivement.

L’auteur se penche donc plus sur l’infecté (le narrateur) que sur l’infection en elle-même. Le narrateur aborde avec précision les symptômes auxquels il a déjà assisté et auxquels il va devoir faire face.
L’aspect surnaturel n’est donc pas vraiment exploité et aurait peut être pu l‘être un peu plus, pour donner du piment au récit. 
On apprend à connaître le personnage au fil du temps et de son journal, sa vie et sa situation familiale tendue. Le point de vue n’en est pas pour autant innocent pour le déroulement de l’intrigue et s’avère original. Il propose un traitement différent, plus humain, intime et moins spectaculaire, du phénomène de « zombification ». Le processus détaillé apporte un éclairage sur le vécu, sur le phénomène en lui-même. Par contre, la nature de la transmission, les ravages, la honte des infectés et le rejet de la société, les difficultés et douleurs engendrées par le traitement fait tristement penser à un virus de notre réalité.

Au fil des pages et du journal, on assiste au dégoût, aux angoisses du malade ainsi qu’aux changements dus à la maladie. Les secrets de familles se révèlent également et on en apprend un peu plus sur la personne que le narrateur a perdu.
Malgré les tensions qui l’opposent à ses parents, il décide de les revoir avant que les symptômes soient trop présents. Conscient de sa haine pour son père qui s’amplifie, il ne sait si elle est liée à la maladie ou à un agacement véritable. On comprend pourtant la vérité et le lien entre les secrets de famille et la perte de la personne qui lui était chère. Les pièces du puzzle se mettent en place. 

Le récit bien mené et le style fluide rendent la lecture du récit agréable, malgré sa gravité. On compatit aux angoisses du personnages, entre des souvenirs pénibles, un présent douloureux et des perspectives d’avenir peu réjouissantes.
Passée la surprise du point d’attaque adopté pour évoquer l’infection et les zombies, on plonge facilement dans l’histoire.
De plus, le narrateur alterne son récit sur ses états d’âme, son quotidien et les contraintes de son travail : il est un célèbre scénariste et garde en tête de finir sa tâche, tant bien que mal. Il l’achève et termine son journal par la même occasion. La fin arrive ensuite très logiquement. On l’attend avec le narrateur et l’accompagne jusqu’au bout de son voyage.

Je remercie le forum « Au cœur de l’Imaginarium » et les éditions « House Made of Dawn » pour cette agréable lecture.

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